La terre est à nous ! Pour la fonction sociale du logement et du foncier, résistances et alternatives
Sommaire du dossier
- Introduction
- La fonction sociale du foncier et la sécurité de l’occupation
- « Socialiser » le foncier en le soustrayant au jeu de la spéculation
- La sécurité du foncier : une introduction
- Chili : villes néolibérales et vulnérables. Entre reconstruction post-désastres et résistances
- La reconstruction de Port-au-Prince après le séisme de 2010 : un problème foncier ?
- Afrique de l’Ouest : Consolider les droits fonciers urbains populaires par des formes juridique et urbaine
- Sécurité de l’occupation et fonction sociale de la terre en Inde
- Droit d’héritage, droit coutumier : un frein à l’émancipation des femmes en Côte d’Ivoire
- Récupérer la ville comme espace de lutte anticapitaliste
- Les terres du Printemps arabe
- Les racines urbaines de la révolte de Gezi à Istanbul
- Les voies vers le développement de la fonction sociale de la propriété au Brésil : entre avancées et tensions sociales
- Le rôle des groupements résidentiels dans la dévaluation du capital social Lakota Oglala
- La lutte du peuple Mapuche au Chili entre terres et territoires
- Les terres palestiniennes comme principal axe de conflit face à l’occupation et au colonialisme
- Avancées juridiques contre les accaparements de terre au Bénin
- Terres et ressources à Madagascar : résistances des populations versus nouvelles convoitises
- La lutte contre les accaparements de terre au Mali
- Dévitaliser le droit de propriété de sa substance spéculative
- Les formes coopératives, communautaires et collectives d’occupation du foncier et leur contribution à la fonction sociale du foncier et du logement
- Hongrie : les agences immobilières à vocation sociale. Un programme de logement innovant
- France : La nécessaire reconnaissance d’un droit d’usage opposable à la vacance
- Se réapproprier le droit pour retrouver une prise sur l’usage du foncier
- L’Andalousie ouvre la voie : occupations populaires et réponse institutionnelle. Des corralas à la loi sur la fonction sociale du logement
- La fonction sociale de la propriété : entre revendications sociales et décisions de justice dans la campagne brésilienne
- Terre et facteurs d’empowerment des femmes : Le mouvement coopératif en Égypte
- Les Community land trust ou la propriété commune de la terre
- L’accès au foncier urbain et la construction de la ville
Les terres palestiniennes comme principal axe de conflit face à l’occupation et au colonialisme
Lorsque les Nations Unies ont accepté la candidature de l’État d’Israël comme membre en 1948, l’accord passé stipulait qu’Israël devait appliquer le droit au retour des réfugiés palestiniens ; comme l’Assemblée Générale de l’ONU l’a affirmé dans sa résolution 194 [1]. Ceci faisait suite à la résolution 181 de l’AG de l’ONU portant sur la partition de la Palestine de 1947 [2], qui proposait d’établir un État juif sur 56 % de la Palestine et un État arabe sur 44 % du territoire, dans le cadre d’une union économique du pays. L’établissement de l’État d’Israël a certainement mené à une dispersion du peuple palestinien, le déplaçant vers la Cisjordanie et la Bande de Gaza, territoires palestiniens historiques, sans compter la population réfugiée et exilée dans les pays arabes et ailleurs. Par la suite, en juin 1967, Israël a mené une attaque contre les pays arabes qui a entraîné l’occupation du reste des territoires palestiniens (la Cisjordanie, alors administrée par le Royaume hachémite de Jordanie, la Bande de Gaza, sous administration égyptienne) et de terres appartenant à l’Égypte, la Syrie et le Liban.
En 1994, Israël a permis l’établissement de l’Autorité nationale palestinienne en tant qu’administration autonome, afin de réduire la charge de l’occupation dans le cadre d’une application de jure de la quatrième Convention de Genève. Aujourd’hui, une large part de la responsabilité administrative des territoires palestiniens repose sur l’Autorité palestinienne et des donateur internationaux. L’État d’Israël a tiré parti des négociations portant sur le « statut final » avec l’Autorité palestinienne, les utilisant pour couvrir son imposition de faits sur le terrain, en poursuivant et étendant ses activités de colonisation, en confisquant des terres, en judaïsant Jérusalem, en établissant un système d’enclaves et de cantons afin de contenir les populations palestiniennes, et en construisant un mur de séparation le long de la Cisjordanie.
Au cours de la première décennie du « processus d’Oslo », Israël avait déjà doublé la superficie des terres confisquées à des fins d’installation de colonies juives en Cisjordanie, et également doublé le nombre de colons juifs résidant dans ces zones [3]. Aujourd’hui, ces colonies sont au moins au nombre de 268, avec plus de 670 000 colons y résidant [4]. Parallèlement, Israël a pris le contrôle de la Vallée du Jourdain, dont le territoire représente environ 23 % de la Cisjordanie et constitue la manne agricole des Palestiniens assurant leur sécurité alimentaire. Israël a également mis la main sur les nappes aquifères, qui comptent pour environ 80 % de l’eau en Cisjordanie et 86 % sur le plateau du Golan. Par conséquent, un résident palestinien de Cisjordanie consomme 1/15e du volume d’eau dont dispose un colon israélien qui vit dans une colonie établie illégalement dans cette région. [5]
Israël persiste à fragiliser l’idée d’un État palestinien indépendant en séparant Gaza de la Cisjordanie et en établissant des colonies. De la même manière, Israël emprisonne les communautés palestiniennes dans des ghettos situés sur une superficie qui ne dépasse pas 58 % des terres occupées en 1967, à savoir seulement 22 % de la Palestine historique. Le blocus israélien de la bande de Gaza s’est poursuivi même après la mise en œuvre par Israël de son plan de désengagement en 2005. Israël déploie de plus de brutales forces d’occupation afin de contrôler ladite « zone tampon », une zone d’accès limité s’étendant sur environ 500m2 au niveau des frontières nord et est de la bande de Gaza. De même, les pêcheurs palestiniens ne sont pas autorisés à pêcher, mis à part dans une zone spécifique n’excédant pas trois milles nautiques de la côte. Ceci participe d’une politique de harcèlement des fermiers et pêcheurs palestiniens, qui nuit à la sécurité alimentaire de la population.
Le conflit relatif aux terres et ressources palestiniennes se traduit par la confrontation de la population à un colonialisme expansionniste qui vise à marginaliser et appauvrir le peuple palestinien. Cette méthodologie d’occupation a pour objectif d’approfondir la dépendance des Palestiniens envers l’économie d’occupation et l’aide internationale ; elle anéantit les dynamiques locales de développement et épuise la viabilité et vitalité économiques nécessaires à l’établissement d’un État indépendant selon les frontières de juin 1967, comme le prônent chaque année les résolutions de l’ONU.
